mardi 25 septembre 2012

Marie-Fernande


Marie-Fernande est très élancée, elle a le cuissot svelte, musclé. Elle a un long cou fin et un port de tête incroyablement élégant. Elle se pose des faux-cils tous les matins, histoire d'approfondir son regard un rien chafouin (j'aime le mot chafouin, ça fait hérisson). Marie-Fernande balance sa nonchalance dans le jardin botanique Adolpho Ducke. Elle laisse ses rangs de perles aller de ci de là au rythme de ses enjambées, elle a de longues jambes, 1m20. Elle aime ça, elle sait qu'elle a tout d'un top modèle, et la dolence un peu forcée d'un navire en perdition.
Elle aime le regard que les hommes et les femmes portent sur elle. Quand un homme passe à sa hauteur et lui touche le croupion, elle sait bien qu'elle y perd une plume... mais c'est pour la bonne cause, elle sera bientôt au sommet du chapeau de la femme qui l'accompagne.
Marie-Fernande est d'une grande famille d'autruches, Marie-Fernande de Struthio, lignée solide qui balance son invraisemblance dans les rues de Manaus. Elle se pavane devant l'opéra, sans claudiquer comme l'aurait fait Sarah Bernard si elle avait daigné voir cet ouvrage construit au milieu de l'Amazonie. Capricieuse, Marie Fernande est aussi capricieuse. Marie-Fernande a d'autres amis tout aussi majestueux, Olaf le grand éléphant d'Afrique, Cléopatre, l'Oryx et Hubert le buffle venu des lointaines rizières. Certes, ils ne comprennent pas très bien pourquoi ils se retrouvent au milieu de l'Amazonie, mais l'important c'est d'y être.
Ils sont respectés.
Marie-Fernande s'adonne à ses plaisirs coupables préférés, s'assoir dans une churascaria aérée, près du rio Negro et s’empiffrer de saucisson à l'ail en lançant des œillades assassines aux garimpeiros revenus des camps d'orpailleurs du Nordeste que l'on dit meurtriers et sans espoir. Les garimpeiros ont de la poudre d'or sur la peau et au fond des poches, des cicatrices et quelques parasites, et Marie-Fernande aime ça, autant que le saucisson à l'ail.

Takicardie mon amie



On fait parfois le projet de vivre heureux longtemps, sans accroc et sans vague. Il est souvent tentant de penser que la vie est un long feuve tranquille.
Il y a bien entendu des accélérations soudaines dues principalement à la fameuse théorie de la takicardie appliquée à l'histoire de nos vies. Mais il y a souvent les passions simples liées à l'état de nos corps et de nos esprits. 
Il y a aussi ces périodes de calme où l'équilibre semble remplir chaque interstice de nos doutes... de mes doutes. 
Je me demande encore à quand remonte ce dernier soubressaut fait de doutes, d'un peu de douleur et d'ennui? 
Demain peut-être, ou la semaine prochaine. 

L'oignon


The Circle Theater (1936) - Hopper


La construction est concentrique. Elle se compose d'une succession de murs hauts, larges, parfois en ruines, usés par le temps. Ces murs constituent une splendide protection architecturale et vivante contre les incursions extérieures. J'ai mis longtemps pour tout construire, j'ai commencé vers l'adolescence, un peu avant peut-être. Je ne repère plus les premiers murs, ils ont pris corps avec des murs plus récents.
Les murs plus récents sont bien structurés, avec peu d'ouvertures, juste quelques meutrières bien placées qui absorbent le soleil aux meilleurs moments de la journée.
Cette construction a pris chaire, elle ne fait qu'une avec moi, elle me protège... un peu trop. Tous les mécanismes d'alarme sont parfaitement au point.
L'homme est un grand architecte, à son esprit défendant... un guerrier subtile qui met en place des stratégies de fuite et de protection. L'homme est un grand architecte qui bâtit des citadelles où il s'isole.
Il y a un joli jardin que j'ai planté à l'extérieur, tout autour, accueillant. Je ne sais pas comment j'arrive encore à l'entretenir, pourtant j'y arrive, sans effort.
Par le slip de Merlin, l'homme et de surcroit la femme sont complexes.

Mémo


Et quand il n'y aura plus personne pour discuter?
Tu parleras petite, tu parleras
Et quand il n'y aura plus personne pour écouter?
Tu chanteras petite, tu chanteras, juste, parce que tu seras ton seul public
Et ça ne sera pas trop dur?
Tu auras des souvenirs plein la tête, tu souriras petite, tu souriras.
Et ensuite?
Ce sont les autres qui seront seuls petite, ce sont les autres qui seront seuls.

Parfois, comme ça, je flotte.


 par David Ho

Et froid... et décadence...


 House with Two Stairs, 1960 by Carel Willink

Je ne sais pas ce qui guide le monde.
Je ne sais pas ce qui peut faire défiler la pelote à idées de mes concitoyens (n'y voyons aucune connotation négative -dans "concitoyen").
"Herpès vaginal" est visiblement un sujet recherché avec entrain par mes semblables.
Il y a sans aucun doute une recrudescence de la magie des mots/maux.
Down by the riverside.
Papy-Daddy, fais-moi un signe, juste pour me dire que le monde n'est pas si taré qu'il y parait.

jeudi 13 septembre 2012

Nuit de Chine et d'ailleurs


Grete Stern  -  Dream No 5 Bottle cast into the sea - 1949

Parfois la nuit est accueillante. Non, non, je ne parle pas d'une nuit d'étreintes amoureuses, non je parle d'une bonne grosse nuit solitaire mais accueillante où je me glisse en silence ou en fanfare, mais avec bonheur, le bonheur du repos, le bonheur de la réflexion, le bonheur d'instants douillets, sombres, qui reposent les yeux et le corps.
Même chaude et ruisselante de sueur, la nuit reste un moment dont l'écoulement, lent, est constant. On note une légère accélération à partir de 4h du matin, quand les bruits s'altèrent, quand quelques oiseaux se mettent à chanter un petit quart d'heure, quand les grenouilles s'essoufflent. Le nuit devient plus dense avant de se dissoudre en lambeaux. C'est le moment où les idées changent de cap, prennent une tournure décente et raisonnée. Les idées de la nuit sont volages et agitées par nature, les idées de la nuit sont parfois saugrenues, elles laissent souvent la place à des lendemains qui chantent.
Mes idées de nuit me portent le reste du temps.
Mes nuits à Shanghaï  sont solitaires et enfantent des projets diurnes.

Pendant ce temps là, Gomez se souvient d'une promenade dans le Puxi district. Morticia lui tient encore la main, en pensée.

Que c'est bon...


Les célébrations, ça n’a de sens que pour ceux qui étaient de la partie… de l’évènement à célébrer.
Aujourd’hui je célèbre, un truc perso. Un an. Une célébration qui ne deviendra pas une tradition, traînée et maltraitée par le temps qui passe.
N’empêche qu’il y a un an, je quittais une partie de ma vie. Je savais bien qu’il fallait que je parte. Pace que. J’en étais convaincue, c’était réfléchi. Le premier jour du reste de ma vie était à portée de main.
Il fallait que je parte, mais je ne savais pas trop où je voulais arriver.
365 jours plus tard, je suis toujours convaincue de la nécessité de ce départ. Et je suis même convaincue par mon point d’arrivée. Ce n’était pas un choix, juste une étape qui prend de l’épaisseur chaque jour, du sens, de la tripaille, de la consistance, du bien fondé.
J’ai trouvé un passage ombragé et frais qui sent l’herbe douce et la nature folâtre. Les gens y sont ce qu’ils doivent être. Et les drôles d’expériences ne sont que des souvenirs sans passion. J’en ai même oublié des visages de cons. C’est dire si le con a une espérance de vie mémorielle limitée (ne pas oublier que nous sommes tous le con de quelqu’un). Il a une vie limitée tout court.
Que c’est bon cette célébration, que c'est bon ce premier jour de ma nouvelle vie et les jours qui viennent ensuite. Que c’est bon de changer, que c’est bon d’oser. Que c’est bon !

 1964 - Girl in mirror

mardi 4 septembre 2012

Granditude et décaditude


J'ai entre 6 et 7 ans, tout juste l'âge de raison. Parfois j'atteins 12 ans, les jours de grands vents où des espoirs inavouables viennent me hanter. Mais en règle générale j'ai 7 ans.
Ceci étant clairement annoncé, pour de vrai, j'ai autour de 48 ans les années bissextiles. Et globalement une année supplémentaire tous les 365 jours.
C'est identique pour tous.
Sauf que là, je viens de prendre 1000 ans. D'un coup. Sans semonce. Les petits que j'ai vus grandir, parfois tenus dans mes bras nourrisson sont de beaux jeunes gens plein d'espoirs, de projets, d'avenues ensoleillées à parcourir. Ils sont terriblement beaux, ont terriblement le teint frais et sont pour l'essentiel bien dans leur tête. Mais quand ces dits enfants que je chéris m'annoncent tout de go qu'ils se marient pour certains, qu'ils seront parents pour d'autres, c'est comme si j'avais raté un épisode complet de leur vie.
 Mais je fais quoi moi? Dois-je gagner en sérieux? M'habiller autrement? Devenir docte et chiante? Ah mes petits, comme c'est étrange de vous voir grands et sages. J'ai mis de côté tout un tas d'épisodes de la vie pour me concentrer sur ce qui me parait important mais qui fait qu'aujourd'hui je ne suis pas très sure d'être plus adulte que vous!

dimanche 2 septembre 2012

Le dragon est une galaxie naine, voisine de la voie lactée


- Dis... tu dors? ... tu entends la pluie qui tombe fort?  (lui)
- oui, j'écoute la pluie qui tombe fort. (elle)
- Dis, je peux me serrer contre-toi? (lui)
- tu te serres déjà contre moi... et je me serre contre-toi (elle)
- Je me sens si seul parfois (lui)
- moi aussi.(elle)

Après, il enroule sa main autour de la mienne.
Après, j'écoute la pluie tomber en rafales, taper sur la tôle ondulée du toit, prendre de l'ampleur, cacher le ronflement du ventilo. Lui, il dort.
Je me lève, je le regarde, recroquevillé dans son coin de la natte. La nuit m'appartient, la pluie est ma compagne, avec le vent et un reste de moiteur ambiante.
Je sors sur la terrasse, je m'assois au bord du hamac.
Il est 3h22.

les crédits de ce cliché me sont inconnus. J'ai repiqué ça en 
direct sur internet - la honte... n'hésitez pas à me les indiquer

Comme ça


Cocoon by Alex Andreyev